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Albert Camus: Solitaire Et Solidaire: Catherine Camus interview, daughter of Albert Camus:

Russell Wilkinson parle avec Catherine Camus au sujet de Le Premier Homme d’Albert Camus

[Traduction française de Maria Kaninski et Emmanuelle Dumas
For the English version of this interview, click here.]

En janvier 1960, l’écrivain et philosophe français Albert Camus meurt dans un accident de voiture avec son ami et éditeur Michel Gallimard. Le manuscrit inachevé du dernier roman de Camus, Le premier homme, est sauvé de l’épave. En 1957, Camus avait obtenu le prix Nobel de littérature pour ses romans les plus renommés, L’étranger et La peste. 50 ans après sa publication, L’étranger reste toujours son best-seller en France. En octobre 1995, Le premier homme fut enfin publié en anglais, 30 ans après la mort de Camus. Sa fille, Catherine, choisie de publier le manuscrit inédit. Les canevas ont été compilés avec les notes de l’auteur, ce qui augmente la progression et le développement du roman. En tant que tel, Le premier homme démontre le déroulement d’une ouvre – quelque chose qu’on ne voit que rarement. Le roman lui-même est une méditation profondément autobiographique sur l’enfance pauvre de Camus dans une famille sans père en Algérie au début du siècle. Bien qu’il reste inachevé, une grande partie du texte possède la lucidité et la sensibilité caractéristiques de Camus, démontrant clairement que son meilleur travail restait encore à venir avant sa mort tragique et prématurée à l’âge de 47 ans.

Catherine Camus et Robert Gallimard sont venus à Londres en octobre 1995. À l’hôtel Basil, ils ont examiné l’importance de Le premier homme pour notre évaluation d’Albert Camus en tant qu’écrivain et philosophe politique à la fin du vingtième siècle.

Russell Wilkinson: Dans votre note d’éditeur pour Le premier homme, vous semblez indiquer que nous sommes à présent dans une époque plus réceptive au travail de Camus. Est-ce que vous pensez que Camus a été négligé pendant ces dernières années ?

Catherine Camus: Il n’a jamais été abandonné par ses lecteurs. Camus est extrêmement lu. Il est l’auteur qui se vend le plus dans l’entière collection Gallimard et il l’a été pendant plusieurs années maintenant. Les ventes n’ont jamais baissé, donc parler de le redécouvrir laisserait entendre qu’il ne soit plus lu, et cela n’est pas vrai. C’est seulement qu’en publiant Le premier homme, je me disais : ” ça va être horrible “, mais horrible du point de vue de la critique. Je n’ai pas peur de son public. J’ai peur de ce qu’on écrirait dans les journaux. Il y a tout de même des signes que les intellectuels retournent à Camus aujourd’hui. L’histoire leur a donné raison, avec la chute du Communisme. En réalité, c’était toujours à cause du problème communiste qu’il y avait de l’opposition contre Camus. C’était toujours et surtout quelque chose de politique, une sorte de malentendu. Camus avait dénoncé le goulag et les procès de Staline. Aujourd’hui, nous pouvons dire qu’il avait raison. Mais à l’époque, dire qu’il y avait des camps de concentration en URSS était blasphématoire, vraiment très grave. Aujourd’hui, quand on pense à l’URSS, on tient compte des camps, mais avant, cela n’était pas permis, tout simplemen. Personne n’avait le droit de le dire ou de le penser si on était de gauche. Camus insistait toujours sur le fait que les critères historiques et l’argumentation historique n’étaient pas les seules choses qu’il fallait considérer, et qu’ils n’étaient pas omniscients, que l’histoire pouvait toujours se tromper vis-à-vis de l’homme. C’est ainsi que nous commençons à penser aujourd’hui.

RW: Est-ce que vous pensez donc que le travail de Camus est en train d’être justifié après ce temps d’isolement intellectuel ?

Robert Gallimard: Tout cela dépend de l’époque. Juste après la guerre, avec la libération en 1945, Camus était bien connu et bien aimé par Sartre et par tous les intellectuels de cette génération. Il y a une interview donnée par Sartre aux États-Unis où on lui demande quel est le futur de la littérature française, et il répond que le prochain grand auteur à venir est Camus. Et puis le temps passe, et une argumentation beaucoup plus politique que littéraire intervient, et à partir du jour où Camus écrivait L’homme révolté, en 1955, il y a la rupture, et tous, ou presque tous les intellectuels de gauche lui deviennent hostiles. Comme il était déjà mal vu de la droite, il se trouvait complètement seul. Et puis, pendant les années 80, ceux qu’on appellerait les jeunes philosophes de France, comme Bernard et Gluxman, ont remarqué que Camus avait dit des choses que personne ne voulait entendre dans l’arène politique. Ils disaient que c’était Camus qui avait raison et non pas ceux qui sont tombés sous l’influence de Sartre, ce qui était une soumission inconditionnelle au Communisme comme on l’avait vu en Union Soviétique. Et à partir de ce moment là, les opinions de Camus ont continué de se modifier jusqu’à maintenant. Les intellectuels de son âge qui ne l’avaient pas aimé avant l’apprécient maintenant. Donc nous revenons sur la littérature, et nous constatons qu’il était toujours un grand auteur.

albert Camus pic

RW: Ce qui nous amène expressément à la publication de Le premier homme. Comment ce livre va-t-il changer nos perceptions du travail de Camus ?

CC: Il faut remarquer qu’il n’a écrit qu’un tiers de ce qu’il avait voulu écrire. Le premier homme est son dernier travail, posthume. Mais vraiment, d’une certaine manière, c’est son premier, parce qu’on y trouve les signes de ses engagements et aussi de sa façon d’écrire tout entière. Ce mélange d’austérité et de sensibilité, la volonté de parler pour ceux qui ne peuvent pas parler pour eux-mêmes.

RW: Il y a des fois dans ses lettres à Louis Germain [l’instituteur de philosophie de Camus en Algérie, publiées dans les Annexes] où il a l’air mécontent de son travail sur Le premier homme. Après avoir reçu le prix Nobel, est-ce qu’il se sentait sous pression de produire son ouvre définitive?

CC: Il n’écrivait pas sous l’influence du prix Nobel. C’était une chose superficielle pour l’artiste en lui. Le prix Nobel, ça vient de l’extérieure, c’est une sorte de reconnaissance sociale. Et je pense qu’un vrai artiste est poussé par des nécessités intérieures. Nous ne pouvons pas parler du livre qu’il voulait écrire parce que nous avons à peine ses débuts. Il ne l’avait guère écrit, mais il avait besoin de l’écrire. Il me semble que lorsqu’on regarde le style de Le premier homme, il ressemble beaucoup plus à ce qu’il était en tant qu’homme. ça lui ressemble énormément.

RW: Est-ce que nous allons arriver à une notion plus claire de ses idées philosophiques en lisant cette oeuvre?

CC: Peut-être pas, parce ce qu’elle est dans un état assez brut. Mais de cette façon, sous ces conditions, on voit plus, sans aucun des artifices de l’art, sans effacements. Elle est peut-être en même temps plus vrai. Je pense qu’il voulait écrire quelque chose pour expliquer qui il était et de quelle façon il se distinguait de l’époque qu’on lui avait conféré. Il est souvent perçu comme un moraliste austère, mais c’est sur le terrain de football et au théâtre qu’il a appris sa ” moralité “. C’est quelque chose de sensuel, ça ne passe pas uniquement par la pensée. Ce n’est pas possible. Il a commencé à penser par la sensation. Il ne pouvait jamais penser avec des objets ou avec des modèles culturels parce qu’il n’y en avait pas. Donc, c’est vrai que sa moralité était extrêmement ” vécue “, faite de choses très concrètes. Ça ne passe jamais par des abstractions. C’est sa propre expérience, sa façon de parler. Il y a ceux qui seront attirés par ses notions d’absurdité et d’autres qui seront attirés par le côté solaire de son travail sur l’Algérie, la chaleur, etc.

RW: Comme Le premier homme parle de la naissance de Camus et de son enfance en Algérie, il me semble étrange que ses liens profonds et personnels avec la crise nationaliste algérienne soient ignorés dans le portrait traditionnel de lui en tant qu’écrivain français. Est-ce que vous pensez que Le premier homme nous fera réévaluer l’importance de l’Algérie dans nos considérations de Camus ?

CC: Je l’espère. Camus était né en Algérie de nationalité française et il était assimilé dans la communauté française, bien que les colons français l’avaient repoussé absolument à cause de sa pauvreté. Politiquement, il était en faveur d’une fédération et en effet, il considérait que, comme en Afrique du Sud aujourd’hui (ou comme ils essayent de le faire), il devait y avoir une population mixte avec des droits égaux, les mêmes droits pour les populations arabes et françaises, et puis aussi pour toutes les autres populations qui y habitaient.

RW: Est-ce que vous pensez qu’il se voyait lui-même comme le premier membre d’une race de déracinés, en vue de l’absence de son père et la dualité culturelle de son éducation ?

CC: Non, pas à un niveau politique. Il est Le premier homme parce qu’il est pauvre, ce qui n’a jamais été grand chose pour les êtres humains. Il connaissait bien l’Algérie. Il a été exilé de son pays mais il vivait toujours dans sa langue. Solitaire et solidaire. Ce n’est pas la même chose que ceux qui sont exilés dans un pays où la langue n’est pas la leur. Il n’avait pas beaucoup d’espoir que ça marcherait, mais il voulait que çá marche. L’Algérie avait produit tant de violence, et quand une telle violence existe il n’y a plus d’espace pour la réflexion. Et il n’y a pas de position de médiation. Si on regarde aujourd’hui la situation en Bosnie, les Croates, les Bosniaques et les Serbes ont créé tant d’horreur qu’on commence à se demander comment ces gens peuvent vivre ensemble après avoir fait tout ce qu’ils ont fait. La violence est déjà arrivée à un tel degré que tout le monde vit dans la haine, il n’y a pas de possibilité pour la réflexion, pas de position réconciliante. Il n’y a personne qui peut dire ” ces gens ont tort là et raison ici “. C’est ce qui pourrait donner la possibilité à des populations, ou même à deux êtres humains, de vivre ensemble. Nous allons seulement résoudre les problèmes par l’acceptation de, et l’enrichissement par, nos différences.

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RW: Alors, Camus essayait de vivre le paradoxe d’être en même temps ” solitaire et solidaire ” ?

CC: Je pense que Camus se sentait très solitaire. On peut voir ça dans tous ses livres. L’étranger n’est pas Camus, mais dans L’étranger il y a des éléments de Camus. Il y a cette impression d’exil. Et ce n’est ni de Paris ni d’ailleurs qu’il est en exil, mais du monde intellectuel, à cause de ses origines. Et ça, c’est un exil complet. Juste à cause de sa façon de sentir avant de penser. Il se trouve dans un espace duquel il voudrait souvent s’échapper. De toute manière, on doit apprendre ce que c’est que le sang. Il faut que tout cela soit rationalisé. Sur ce point il se sent exilé, solitaire…

RG: Et pourtant, une chose qui est évidente c’est que Camus ne pouvait jamais être un homme neutre. Il était engagé vraiment et physiquement dans la Résistance. Alors, là il s’est engagé dans le combat contre le nazisme. Et il gardait toujours un engagement profond, une vraie résistance contre tout totalitarisme. On oublie souvent que Camus était extrêmement farouche contre le régime de Franco, et jusqu’à la fin. Il refusait de voyager en Espagne, il quittait l’UNESCO parce que l’UNESCO avait accepté l’Espagne de Franco et lui avait permis un discours. Camus était complètement intransigeant – cela, ce n’est pas du tout une neutralité. C’est le combat, un homme qui s’est engagé. Bien sûr, il n’était pas existentialiste, mais il était engagé, un homme de combat. Ce n’était pas pour rien qu’il dirigeait le journal de la Résistance intitulé Combat.

RW: Et comment est-ce qu’on peut expliquer la différence entre son engagement et celui des existentialistes ?

CC & RG ensemble: Il n’était pas existentialiste !

RG: Il a toujours refusé de l’être.

RW: Un autre exemple d’être solitaire et solidaire, d’être un ami de Sartre mais en gardant sa distance avec le credo existentialiste ?

CC: Oui. Aujourd’hui on commence à voir comment ça marche. Mais d’habitude c’est seulement quand les choses vous frappent de plein fouet que vous commencez à les comprendre. Chacun a tant d’espoirs pour une humanité meilleure et beaucoup, y compris Sartre, se sont tournés vers le Communisme à ses débuts. La générosité avait une place dans les espoirs des hommes. Mais Camus avait remarqué que nous avons beaucoup à traverser. Il faut que tout soit accepté avant d’être amélioré. Quand on a demandé à Sartre s’il voulait vivre sous un régime communiste ou non, il a dit, ” Non – pour les autres c’est bien, mais pas pour moi, non. ” Il l’a dit ! Donc c’est difficile de dire jusqu’à quel point son attitude est intellectuelle. Comment est-ce qu’on peut penser que jamais dans sa vie on vivrait sous un régime communiste et en même temps dire que c’est bien pour tout le monde ? Une chose bien difficile, mais Sartre y arrivait. Camus, non ; et c’est avec ça que nous sommes confrontés aujourd’hui, je veux dire avec ce qui est l’idéologie pure, qui ne tient pas compte du contexte humain. En matière d’économie, c’est la même chose. L’économie voulait compter sur la théorie sans considérer les critères humains, ou le paramètre ” homme “. On finit par se cogner la tête contre les murs, ça ne marche pas. Non pas si on fait abstraction de l’homme. C’est pourquoi Camus est plus à la mode maintenant, parce qu’il dit toujours ” oui, mais il y a l’homme “. C’est la première chose ; ” parce que moi, je suis homme “. Et c’est ça, la solidarité.

RW: Est-ce que Le premier homme est donc son ” pont ” entre l’expérience et la philosophie ?

CC: Ce que proposent les articles qui ont déjà été écrits sur Le premier homme c’est l’humilité. L’acceptation de ces contradictions. Chercher une explication est la mort. Le mensonge est la mort chez Camus. C’est pour cela que dans le drame Le malentendu, le fils meurt, tué par sa sour et sa mère, parce qu’il avait menti. Il ne leur a jamais dit qui il était. Elles le tuent parce qu’elles ne le reconnaissaient pas. Mais Camus dit aussi que rien n’est vrai qui force l’exclusion. Donc, on est obligé d’accepter des contradictions si on ne veut pas repousser certaines choses par rapport à la vie, certaines évidences. Si on crée un système, et puis on dit ” ici il y a la vérité, dans ce genre de chemin “, on évacuera tous les autres chemins, et on tuera la vie. Cela dépend de l’individu. Ce n’était pas exactement l’établissement que Camus avait attaqué. Il disait, ” si ça marche, tant mieux “. Son but était d’aider les gens à vivre. C’est ça l’important. Je pense que ce qu’il y a de plus important pour un artiste, c’est de toucher autant de cours que possible.

RW: Etant dédié à sa mère, est-ce que vous pensez que Le premier homme donne une image plus claire de ses idées de la féminité ?

CC: C’est vrai que les femmes apparaissent très peu dans ses autres ouvres. Elles ont une place très marginale. Mais la féminité, oui, en effet, il y en a plus dans Le premier homme, non seulement par rapport aux femmes mais stylistiquement, dans ses éléments, dans les notes qu’il a écrites. On peut y voir une vraie histoire d’amour, une histoire d’amour d’enfance, la première de Camus. Meursault [le protagoniste de L’étranger] et Marie n’ont réellement jamais vécu grand-chose. Il y a Dora dans Les Justes et quelques autres dans ses pièces mais elles ne sont pas trop bien connues. Je pense que pour Camus sa mère était plus que ça. Elle est l’amour, l’amour absolu. C’est pour cela que Le premier homme est écrit pour elle, dédié, ” À toi qui ne pourras jamais lire ce livre “. Et l’amour est très important dans Le premier homme, parce qu’il aime ces choses qu’il n’a jamais choisies, il aime ses expériences d’enfance d’une façon très réelle. Leur pauvreté voulait dire qu’il n’y avait rien d’autre à penser que ce qu’ils allaient manger, comment s’habiller. Il n’y a justement pas de place pour autre chose dans sa famille. C’est difficile pour les autres de se mettre à sa place. Il n’y a pas d’existence imaginaire dans leurs vies. Les intellectuels français sont pour la plupart des petits bourgeois, mais c’est difficile de dire si cela rend plus valable le travail de Camus. Je dirais plutôt qu’il est différent. Nécessairement. Ses positions sont ressenties. Ainsi, naturellement, les intellectuels qui n’ont pas eu cette expérience ont des difficultés à la comprendre. Mais je pense que cela l’a rendu plus tolérant parce qu’il avait déjà vu les deux cotés des choses lorsque les autres n’en avaient vu qu’un. Ils imaginent la pauvreté, mais il ne la connaissent pas. Ils ont même une sorte de mauvaise conscience vis-à-vis de la classe ouvrière. C’est la perspective qu’ils ne pouvaient jamais adopter, non pas comme Sartre voulait l’adopter, parce qu’ils ne la connaissent pas. Ils ne savaient jamais comment s’adresser à eux. Ils ne comprennent pas ce que ça veut dire, et cela leur donne mauvaise conscience. Camus était plus proche des pauvres.

RW: Et est-ce que cette proximité vient de son humilité, qu’on peut voir dans les lettres à M. Germain, son vieil instituteur, publiées à la fin de Le premier homme ?

CC: C’est parce que son instituteur dans Le premier homme a une place essentielle. Camus nous le montre exactement comme il était. Le premier homme est complètement autobiographique. La mère qu’il décrit est la femme que je connaissais, et elle était exactement comme il la décrit. Et cet instituteur existait vraiment. Mais ça montre aussi que les hommes attachent tant d’importance à la célébrité, et Camus écrit son discours d’acceptation du prix Nobel en remerciement pour son instituteur. La reconnaissance, l’appréciation existent. C’est pour montrer que voilà le résultat de tout ce que son instituteur a fait pour lui. Et de plus, qu’il y a des M. Germain partout dans le monde. C’est pourquoi j’ai publié les lettres, pour lui donner une place dans l’ouvre. Mais je ne pourrais jamais agir ou penser au nom de ce que mon père aurait dit ou fait. C’était un artiste, il se considérait artiste, et ainsi il prenait la responsabilité de parler pour ceux qui n’ont ni les moyens ni l’opportunité.

August 1, 1999 Filed Under: Interviews

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